fort espagnol de Tarfaya

Tarfaya, mon coup de coeur marocain

Autrefois la petite ville de Tarfaya qu’on appelait alors « Cap Juby » était une escale incontournable sur la ligne mythique de l’aéropostale qui rejoignait Toulouse à Dakar. Aujourd’hui, les voyageurs ne s’y arrêtent plus guère et pourtant des associations, des bénévoles se battent au côté des autorités pour donner aux visiteurs l’envie de découvrir la richesse historique du lieu.

Extraits de mon carnet de route … « 26 Avril 2024. Voilà maintenant 15 jours que j’ai quitté la Lorraine avec ma Royal Enfield 500. Je me trouve maintenant à Tarfaya,  3500 km plus au Sud. A vrai dire, cet endroit ne m’est pas complètement inconnu. Je l’ai « découvert » à partir de reportages consacrés au rallye aérien qu’accomplissent chaque année des pilotes amateurs venus rendre un hommage aux pionniers de l’aéropostale et à Saint Exupéry. (Dans les années 20, les aviateurs de la ligne Toulouse-Dakar faisaient ici une escale technique). Un musée rappelle cette épopée.  C’est donc avec plein d’images en tête que je me suis baladé dans une ville au patrimoine historique très dense. Un coup de coeur ! Une destination exceptionnelle dans un environnement  façonné par l’immensité du Sahara et de l’Océan.

MOMENT VIDEO

« Je suis resté 2 nuits à Tarfaya et j’y ai réalisé la vidéo suivante.

 

UN PEU D’HISTOIRE

La présence anglaise et espagnole

La casa Grande à Tarfaya

Adossée à l’Atlantique, tout au Sud du Maroc, Tarfaya a le charme tranquille des petites villes côtières du Sahara. Entre océan et désert, à quelques 100 km de Laayoune, elle semble pourtant à l’écart du Monde. Mais cette impression ne coïncide guère avec la forte volonté locale d’y promouvoir un tourisme culturel. Tarfaya en a les atouts !  Quand je suis arrivé en fin d’après midi dans cette cité du bout du monde, j’ai longé l’artère principale avec ses nombreux petits cafés et restaurants. En descendant cette rue qui mène au port, j’ai trouvé l’hôtel Casamar. J’y passerai quelques nuits. De ma chambre je pouvais voir le port, ses bâtiments, ses bateaux de pêche…

hôtel casamar à Tarfaya

J’ai tout de suite compris l’importance de la pêche dans  l’activité économique de la région. Mais plus encore, ce sont les vestiges du passé, la richesse du patrimoine de la ville qui frappe le visiteur. Je n’ai certes pas la prétention de restituer ici la complexité dess grandes périodes de ce passé. Je me contenterai simplement d’appréhender quelques bribes de cette histoire. 

Sur la plage de Tarfaya
Plage de Tarfaya

En longeant le port, après l’enceinte qui l’entoure, on arrive sur la plage de Tarfaya. On est alors immédiatement frappé par cette bâtisse délabrée au bord de l’effondrement. C’est la fameuse Casa del Mar, encore appelée Casamar, le joyau de la ville, un élément marquant de la mémoire collective. Le travail du temps en a fait ce qu’elle est aujourd’hui : un bâtiment tombé en décrépitude faute de moyens suffisants pour le restaurer. Construite entre 1878 et 1882 au large de Cap Juby (l’actuelle ville de Tarfaya), l’édifice rappelle la présence anglaise. Il est une des composantes majeures du patrimoine colonial de l’époque. Conçu à l’origine comme un comptoir commercial, l’explorateur et commerçant britannique, Donald Mackenzie ambitionne, avec le soutien du gouvernement britannique, d’en créer d’autres le long de la côte. Ce Projet n’aboutira pas et Tarfaya ne restera pas longtemps aux mains des anglais. En effet en 1895, le Sultan Hassan 1er négocie le retrait des anglais et obtient gain de cause. Mais, en 1916, après un accord passé avec la France, c’est au tour de l’Espagne de coloniser la ville et de rattacher ce territoire aux provinces sahariennes qu’elle administre depuis 1912. Elle  utilise alors Casamar comme bâtiment du port puis comme prison. Il faudra attendre 1958, et la guerre D’Ifni pour que Tarfaya soit restituée au Maroc. C’est d’ici que le 6 novembre 1975, le roi Hassan 2 lance vers le Sahara occidental la fameuse Marche verte regroupant plus de 350000 marocains avec la ferme intention de récupérer l’espace de 266000 km2 laissé par les espagnols.

 

fort espagnol de Tarfaya

 Saint Exupéry à Cap Juby (Tarfaya)

C’est là, entre le désert et l’océan, à Tarfaya qu’Antoine de Saint Exupéry  va se découvrir une passion pour le Sahara et qu’il va écrire Courrier Sud. C’est également ici, dans une forteresse rudimentaire faite de hauts murs blancs, qu’il esquissera les contours de son Petit Prince, qu’il publiera à New York en 1943. Avec Mermoz et d’autres grandes figures de l’aviation, il pilotera les avions de la compagnie Latécoère chargé d’acheminer le courrier depuis Toulouse jusqu’à Dakar. Tarfaya, Cap Juby à l’époque, sert d’escale technique et de ravitaillement.  Dans un environnement très hostile où le risque d’être enlevé ou tuer par les tribus locales est élevé, il sera nommé chef d’escale chargé d’ accueillir les pilotes et les mécaniciens  de l’aéropostale. En souvenir de cette époque, en 2004 sera créé le monument qui représente un Bréguet 14 et aussi le musée Saint-Exupéry. Mais pas seulement, un  Rallye aérien Toulouse Tarfaya/Cap Juby, effectue chaque année en hommage aux pionniers de l’aéropostale, un vol.

monument en hommage à l'aéropostale à Tarfaya
Musée Saint Exupery
musée saint exupery
Saint Exupéry à Tarfaya

Quelques Impressions

Comme posée sur le sable du Sahara, balayée par les vents, Tarfaya est à l’écart de la nationale 1 qui relie Tanger à la frontière mauritanienne. Le voyageur pressé de rejoindre Dakhla ou l’Afrique de l’Ouest ne s’arrête pas ici. Il file tout droit. Il traverse…Et pourtant, cette cité mérite qu’on y fasse ne pause. Flâner dans sa rue principale avec ses cafés et ses quelques restaurants, poursuivre sur le port de pêche entouré d’un haut mur sur lequel on a tagué le nom de Saint Exupéry, la « gloire » de la ville, c’est prendre le pouls de la ville. La plage et ses monuments ne sont alors plus très loin. Dans cette partie côtière de Tarfaya on est alors au coeur de son Histoire. Dans ce  lieu, là où le bleu du ciel et l’éclat du soleil irise le sable blanc du désert, j’ai ressenti l’âme d’une cité au passé mouvementé. En fin de journée, au soleil couchant je me suis promené au bord de l’océan, en contrebas de l’ancien fort espagnol. J’ai attendu, assis sur le rebord d’un muret que la nuit enveloppe de son manteau noir le paysage : un émerveillement à nul autre pareil. Le nez dans les étoiles, je respirais avec jubilation l’air frais et pur du large. Au-delà de ses longues plages de sable fin, de sa côte venteuse, au-delà du spectacle fascinant d’un désert qui se jette dans l’océan, c’est la charge de l’histoire et du potentiel culturel de ce lieu qui m’a le plus impressionné. A Tarfaya, dans cette cité de presque 7000 habitants, j’ai réalisé  comment le temps se mêle à l’espace, comment il peut réveiller de fortes et nostalgiques sensations. Sans doute faut-il voir là, dans cette intuition poétique, un sens et une densité émotionnelle au voyage !

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